Toute randonnée en montagne ou course d’alpinisme comporte des risques. Cependant, une préparation soignée permet, sans les éliminer totalement toutefois, de les réduire considérablement. En outre, le choix de l’itinéraire est indissociable de la météo alpine.
Au pied de la voie, je lève les yeux et tente de m’orienter. Il y a deux semaines, j’étais déjà ici en repérage. Les repérages font partie de ma profession. Je suis photographe. Néanmoins, depuis ma première visite, il a neigé. Je pensais que tout aurait fondu et qu’il n’y aurait pas de problème. En effet, la paroi est relativement facile et se limite aux degrés II et III. Cependant, en nous mettant en route, je remarque qu’une bonne partie du rocher est complètement verglacée. Nous grimpons prudemment et progressons plus lentement que prévu. Une fois l’arête atteinte, la partie difficile de l’itinéraire est derrière nous. Mais, en revanche, nous accusons un retard monumental par rapport à l’horaire prévu. Nous profitons encore un peu de la vue et décidons de ne pas poursuivre et rebrousser chemin. Nous aurons au moins appris une chose : en montagne, les conditions météorologiques sont déterminantes et affectent énormément la difficulté d’une course.
Lors de la préparation de la course et de l’évaluation du risque, les conditions météorologiques incarnent ce qu’on appelle des dangers objectifs. Contrairement aux dangers subjectifs, tels que les chutes, la perte d’orientation et la surestimation de ses capacités, il est impossible d’éliminer les dangers objectifs en ayant recours à ses capacités techniques ou psychologiques. Savoir reconnaître et évaluer correctement ces dangers requiert beaucoup d’expérience et de vastes connaissances. Les systématiser et s’entraîner permettent de mieux les appréhender et de les réduire. Ces étapes sont nécessaires à la préparation de toute sortie en montagne.
Influence de la météo sur la préparation de la course
La préparation de la course comprend plusieurs étapes de base, comme, par exemple, le choix de l’itinéraire et la préparation d’un plan B. De plus, il faut toujours considérer les interactions entre le terrain, le facteur humain et les conditions du moment. Nous nous limiterons aujourd’hui aux conditions météorologiques. Vous trouverez de plus amples informations au sujet de la préparation de la course et de la gestion du risque dans le livre « Sports de montagne d’été, tactique, technique et sécurité » ou sur le site web du CAS.
Quel est donc l’impact de la météo sur la préparation de la course ? De nombreux accidents de montagne ont un lien avec les conditions météorologiques. Ces dernières influencent directement le terrain. La neige et l’eau rendent les rochers glissants, augmentant ainsi le risque de chute. Dans le pire des cas, certains passages peuvent être rendus tout simplement infranchissables ou, du moins, occasionner une grosse perte de temps. De tels passages doivent être identifiés et pris en compte dès la préparation de la course. Il est judicieux de fixer un point de décision juste avant un tel passage clé ou, au minimum, avant les « points de non-retour ». Arrivé au lieu de décision, on ne continuera que si les conditions correspondent à ses attentes. Dans le cas contraire ou en cas de doutes, il vaut mieux rebrousser chemin. Savoir renoncer fait également partie de l’alpinisme et de la randonnée. Le froid a, lui-aussi, un impact important. Il fatigue le corps et conduit à une fatigue mentale supplémentaire. En cas de mauvaises conditions, l’horaire s’allonge et les hélicoptères de secours restent cloués au sol. Les nuages bas ainsi que le brouillard compliquent l’orientation et peuvent masquer des dangers potentiels. Sur une arête ou dans les endroits exposés, la foudre constitue aussi un danger à ne pas négliger.
Identifier un changement de temps
Comment reconnaître les signes d’un changement de temps ? Ou comment éviter ce genre de situation ?
Avant la course : comme mentionné précédemment, les conditions du moment actuelles doivent impérativement être considérées, lors du choix de la course déjà. Les gardiens ou guides de montagne donnent volontiers des informations à ce propos.
Il est ensuite indispensable de consulter les prévisions météorologiques peu avant la course. Il existe de nombreuses sources d’informations météorologiques. Certaines sont gratuites, d’autres payantes. Des sites tels que MétéoSuisse, météoblue ou la météo alpine du Club Alpin Allemand, DAV, constituent des sources fiables permettant de s’informer sur la situation générale. Le dernier lien fournit des informations pour l’ensemble de l’arc alpin. Il existe également de nombreuses applications de fournisseurs sérieux, comme celles de MétéoSuisse et Météoblue. Puisque les prévisions météorologiques se basent souvent sur des modèles de prévision différents, il est recommandé de consulter les prévisions de plusieurs services. Des conseils personnalisés par téléphone sont très recommandés, surtout en cas de situation instable ou critique. Par exemple, il est possible de profiter du service téléphonique de MétéoSuisse à toute heure du jour ou de la nuit (0900 162 333, CHF 3.- l’appel + CHF 1.50 la minute). Les prévisions météorologiques, spécialement celles à court terme, se sont grandement améliorées. Si les prévisions de température sont très fiables, celles qui concernent les précipitations doivent être considérées avec prudence. Face à un bulletin météo, je me pose généralement quelques questions de base. Quelle est la situation générale ? La météo est-elle stable ? Y a-t-il une tendance aux orages ? Quel est le cumul de précipitations attendu ? Quels seront le vent, la température et l’altitude des nuages (brouillard) ? Vous trouverez plus d’informations dans les manuels d’alpinisme ou dans le guide du CAS intitulé « Manuel météo pour randonneurs et alpinistes ».
Durant la course : une fois en route, on ne peut pas compter sur le réseau téléphonique partout. Observer l’évolution de la météo pendant la course est indispensable, surtout si les conditions sont instables. En été, le risque d’orage est l’élément le plus important de la préparation d’une course. En montagne, les orages, souvent très localisés, peuvent se former en peu de temps. Il est ainsi difficile de les prévoir. En montagne, contrairement à la plaine, non seulement l’évolution de la météo est plus rapide, mais les sommets peuvent également cacher la vue et réserver de grosses surprises.
Attention orages
De manière simplifiée, on peut différencier deux types d’orages : les orages de chaleur et les fronts orageux. Les orages de chaleur se forment lors des jours d’été lourds. Il est souvent possible d’en distinguer les signes annonciateurs dès le matin. On peut apercevoir de petites colonnes nuageuses qui peuvent évoluer en cumulus, puis en cumulonimbus, incarnant le nuage d’orage typique. Les cumulonimbus sont reconnaissables à leur forme typique d’enclume. En cas d’orages de chaleur, la dégradation du temps est seulement temporaire. En général, le lendemain, il fait à nouveau beau.
En cas de fronts orageux, l’évolution est très différente. De nombreux orages couvrant de grandes surfaces peuvent accompagner l’arrivée d’un front froid. Dans les Alpes, la plupart du temps, les fronts orageux proviennent de l’ouest. Il est donc recommandé de scruter attentivement et fréquemment le ciel dans cette direction. Ces orages sont souvent repérables plusieurs heures à l’avance par la présence de cirrus ou d’altocumulus de plus en plus forte. Le vent se fait plus frais, souffle généralement de l’ouest ou du sud-ouest et la pression atmosphérique chute rapidement. Personnellement, je suis la pression atmosphérique au moyen de l’altimètre barométrique de ma montre GPS. Il est indispensable de calibrer l’altimètre avec précision au début de la course. Si l’altitude affichée monte plus rapidement que l’altitude réellement atteinte, c’est un signe de diminution de la pression atmosphérique et d’une dégradation de la météo. Pour obtenir l’altitude réelle, on peut, par exemple, s’aider d’une carte. Il ne faut jamais sous-estimer l’arrivée d’un front froid. En plus du risque d’orage, il faut compter sur une diminution de la température, une péjoration de la visibilité et des précipitations qui peuvent même se transformer en neige.
L’évaluation de la météo demande de l’expérience et des connaissances. Cet article doit être considéré uniquement comme un rapide survol et il ne remplace pas d’autres lectures. Je ne peux qu’encourager tout le monde à approfondir cette thématique. Je recommande en particulier la lecture du livre du CAS « Manuel météo pour randonneurs et alpinistes » qui offre une vue d’ensemble assez complète. De mon côté, j’ai surtout appris par mes expériences. Désormais, je suis attentive à la météo plusieurs jours avant de partir en montagne déjà et je me renseigne auprès des gardiens de cabane ou des guides de montagne au sujet des conditions de la course prévue. Je suis également plus attentive à ma gestion de l’horaire. En cas de doute, je préfère rebrousser chemin de préférence trop tôt que trop tard.
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