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Musique dans les alpes

Peter Hummel, lundi, 20. novembre 2017

De la traditionnelle « Stobete » aux festivals modernes,
les montagnes sont une scène musicale très appréciée. Elles n’en
forment pas seulement le décor, mais sont également le berceau
de leurs propres formes musicales. Des sons traditionnels, mais encore
des développements créatifs expérimentaux – aussi variés que les
montagnes, leurs paysages et leurs habitants.

La musique dans les montagnes connaît un véritable boom : festivals de pop (Zermatt), de jazz (Saint-Moritz), de schlager, etc. La montagne tremble à Flims, à Flumserberg, à Sedrun et à bien d’autres endroits encore. Mais il faut reconnaître que ces manifestations n’ont aucun rapport avec les Alpes, lesquelles servent uniquement de toile de fond. Outre ces festivals, il existe des fêtes de bergers et de vachers traditionnelles comme les « Stobeten » dans la région de l’Alpstein. Ces fêtes primitives célèbrent la musique populaire alpine originale. Mais qu’entend-on au juste par « musique alpine » ? Musique populaire, nouvelle musique populaire ou ländler ? Et quel rôle jouent les instruments alpins traditionnels ?

LES DIFFÉRENTES FORMES MUSICALES
Les formes musicales traditionnelles, souvent non occidentales, combinées à de la musique pop occidentale sont classées aujourd’hui dans la catégorie « musique du monde ». En Suisse et dans l’espace alpin germanophone, les différents courants qui ont émergé au cours des dernières décennies, musique populaire combinée à des éléments tirés du jazz, du rock, du folk et du hiphop, sont considérés comme appartenant à la nouvelle musique populaire. Cette dernière se démarque sciemment de la musique folklorique, le schlager traditionnel.

Le ländler est une musique de danse et d’agrément issue de la musique de danse rurale du 19e siècle. Elle est populaire au début du 20e siècle. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, on l’écoute surtout dans les villes. « Les musiciens de l’époque apparaissent en costumes traditionnels, car ils craignent que leurs costumes du dimanche ne leur donnent un air misérable en ville » explique le chercheur en musique populaire Johannes Rühl. « Lors de son apogée dans les années 1930-1940, le ländler est incontestablement la musique d’agrément numéro un. Cela s’explique d’une part par le fait que cette musique contribue à la création de l’identité suisse dans ces temps de défense spirituelle du pays. D’autre part, parce qu’il n’y a quasiment pas de concurrence étrangère durant la Seconde Guerre mondiale. » Avec l’arrivée fulgurante de la musique française et américaine après l’ouverture des frontières, la musique traditionnelle est de plus en plus considérée comme arriérée. Elle est en particulier proscrite par la jeune génération. Son image conservatrice est encore renforcée par certains shows télévisuels tel le Musikantenstadl. Depuis quelque temps, la musique populaire est revisitée par différents artistes. Avec son duo « Stimmhorn », Christian Zehnder allie sons naturels, instruments, chants diphoniques et jodel à de la musique ethnique expérimentale. Grâce à ses créations, il remporte plusieurs distinctions nationales et internationales. Dans les années 1990, Christine Lauterburg met quant à elle la scène traditionnelle sens dessus-dessous en fusionnant du jodel et de la musique techno, ce qui lui vaut d’être expulsée de l’association des yodleurs en 1993.

NOUVELLE MUSIQUE SUR DE VIEUX INSTRUMENTS
Le joueur de tympanon Töbi Tobler est l’un des pionniers de la nouvelle musique populaire suisse. En 1980, il fonde le groupe « Appenzeller Space Schöttl » avec le contrebassiste Ficht Tanner. Tout en faisant honneur à leur nom, ils conduisent la musique appenzelloise traditionnelle vers de nouveaux sommets grâce à des improvisations free jazz et hard rock. Avec son groupe « Das Neue Original Appenzeller Streichmusikprojekt », il développe en toute créativité la musique appenzelloise ancestrale et obtient une reconnaissance nationale. Noldi Alder, qui appartient à la quatrième génération de la dynastie de musiciens folkloriques appenzellois et qui se définit lui-même comme un « rénovateur de la musique populaire suisse », a joué un rôle central dans ce projet.

De jeunes musiciens tels que Christoph Pfändler poursuivent ces innovations. Lors des représentations données par son groupe « Metal Kapelle », Pfändler fait vibrer son tympanon de manière bien peu traditionnelle. Même des instruments aussi démodés que l’accordéon ont trouvé preneur, notamment avec le Schwyzois Markus Flückiger ou Fränggi Gehrig, originaire d’Andermatt. Ces derniers proposent de nouveaux sons d’accordéon ou d’accordéon schwytzois dans des compositions très différentes. Il est certes plus rare que l’on extirpe des sons inhabituels au cor des Alpes. Pourtant, voilà 40 ans, le morceau « Swiss Lady » du sextet de Pepe Lienhard, présenté au concours Eurovision de la chanson, est resté en tête du hitparade pendant plusieurs semaines grâce aux stupéfiants accords de cor des Alpes de Mostafa Kafa'i Azimi. Une décennie plus tard, le cor des Alpes a une nouvelle fois fait sensation grâce aux formations de Hans Kennel «Alpine Jazz Herd» et «Alpine Experience», l’ethno jazz ayant remplacé la pop. C’est d’ailleurs grâce à Kennel que le plus grand virtuose actuel de cor des Alpes s’est intéressé à cet instrument : Arkady Shilkloper, originaire de Moscou, maîtrise le cor des Alpes du jazz aux classiques dans tous les genres. Shilkloper n’arrive pas à comprendre pourquoi il n’existe pas davantage de musiciens de cor des Alpes en dehors de la musique populaire : « Tous les bons joueurs de cor d’harmonie auraient toutes les qualifications requises. »

« Je tire mon inspiration des Alpes – elles restent les racines de mon oeuvre. »
CHRISTIAN ZEHNDER, VIRTUOSE DES SONS NATURELS

ESSOR EN BAVIÈRE ET EN AUTRICHE
Mais c’est surtout dans nos pays voisins que la nouvelle musique populaire fait fureur. Sa présence y est plutôt radicale : en Autriche avec Hubert von Goisern et Herbert Pixner, « Attwenger », « Global Kryner » et le « Holstuonarmusigbigbandclub » ; en Bavière avec le « Bairisch Diatonischen Jodelwahnsinn » ou « La Brass Banda ». La fanfare est à nouveau tendance, en particulier en Autriche et au sud de l’Allemagne, où les cuivres vrombissent plus fort que jamais dans toutes les combinaisons possibles : l’ensemble de cuivres viennois « Mnozil Brass » remplit les salles les plus renommées du monde entier et le groupe « Da Blechhauf’n » fait même des apparitions dans les festivals de jazz. Des festivals de cuivres comme le « Brass Wiesn » en Bavière et le « Woodstock der Blasmusik » en Autriche attirent même des dizaines de milliers de fans.

« La musique populaire a voyagé des pieds à la tête, et nous ne pourrons plus la faire redescendre. »
NOLDI ALDER, MUSICIEN POPULAIRE DU RENOUVEAU

Concernant la musique dans les montagnes, la Suisse propose un événement unique bien à elle : l’« Alpentöne » à Altdorf (Uri). Ce festival est considéré comme la principale manifestation de nouvelle musique populaire de tout l’espace alpin, sans doute parce qu’il ne s’impose aucun style musical. Qu’il s’agisse de nouvelle musique, de classique, de jazz, de folk ou de musique populaire, ou encore d’un mélange de ces différents styles, seul le lien avec les Alpes compte. Sans compter que le lieu n’a pas été choisi arbitrairement : marqué par le commerce, Uri a toujours constitué un canton dans lequel des hommes de différentes nationalités et cultures se réunissent. C’est précisément pour cette raison qu’a pu se développer un espace culturel aussi vivant. Les musiciens de tout l’arc alpin, des Alpes-Maritimes à la Slovénie, interprètent ensemble des morceaux de musique alpine. De nouvelles compositions, expérimentales ou improvisées, parfois même peu conventionnelles – faisant ainsi perdurer la musique dans les Alpes.

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