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« Des indices révèlent une augmentation des avalanches de neige mouillée à haute altitude. »

Fabian Reichle, jeudi, 17. février 2022

Le changement climatique provoque un accroissement des dangers naturels dans l’espace alpin. Peter Bebi effectue des recherches sur le sujet au WSL Institut pour l’étude de la neige et des avalanches SLF, à Davos. Au cours de cet entretien, il nous explique l’évolution probable des dangers rencontrés en hiver et comment les adeptes de sports de montagne peuvent prendre soin de la neige.

Le changement climatique provoque un accroissement des dangers naturels dans l’espace alpin. Peter Bebi effectue des recherches sur le sujet au WSL Institut pour l’étude de la neige et des avalanches SLF, à Davos. Au cours de cet entretien, il nous explique l’évolution probable des dangers rencontrés en hiver et comment les adeptes de sports de montagne peuvent prendre soin de la neige.

Peter, tu travailles au WSL Institut pour l’étude de la neige et des avalanches SLF. En quoi consiste ta fonction ?
Au SLF, je dirige le groupe Écosystèmes montagnards. Nous mettons l’accent sur les forêts protectrices dans le contexte des dangers naturels, dont les avalanches. Dans ce cadre, je mène des projets de recherche, j’encadre des étudiants et je rédige des propositions de recherche et des publications scientifiques. Je suis également occupé par mes activités sur le terrain pour de nombreux projets. 

L’écologie alpine est elle aussi touchée par le changement climatique. Quelles sont les répercussions sur les avalanches et autres dangers naturels ?
Nous nous attendons à une augmentation des fortes précipitations et d’autres événements extrêmes. On peut en déduire que différents dangers naturels augmenteront en fréquence et en intensité. Concernant les avalanches, la durée d’enneigement diminuera, à basse comme à haute altitude. On peut donc supposer que globalement, le nombre d’avalanches ne va pas augmenter. Au cours des dernières années, nous avons toutefois observé une tendance à un accroissement des avalanches de neige mouillée à haute altitude. 

Mais moins de neige devrait être synonyme de moins d’avalanches, non ?
Pas forcément. Même s’il a tendance à faire toujours plus chaud et que la durée d’enneigement diminue, il peut toujours tomber d’importantes quantités de neige. Dans un tel cas, les avalanches de neige mouillée peuvent prendre des dimensions et une puissance de destruction impressionnantes. De plus, lorsque le manteau neigeux est moins épais, les couches fragiles sont plus fréquentes. C’est pourquoi, même si les températures grimpent, nous devrons continuer de nous intéresser à la protection contre les avalanches.



Peux-tu nous citer un scénario concret pour d’autres dangers naturels ?
Les effets en cascade pendront de l’ampleur. Le changement climatique causera davantage de perturbations naturelles, telles que les incendies de forêt ou les dégâts dus au bostryche dans la forêt, ce qui peut favoriser l’apparition de glissements de terrain. 

La forêt représente également une protection contre les avalanches. Si on ne peut plus compter sur elle, cela signifie-t-il que l’on devra construire davantage d’ouvrages paravalanches ?
La forêt restera importante. Elle gagnera même en importance eu égard à la protection des dangers naturels. Avec le changement climatique, la limite des arbres montera et les forêts protectrices auront tendance à s’étendre. Les ouvrages paravalanches continueront cependant d’être nécessaires, car les zones de départ d’avalanches se situent souvent bien au-dessus de la limite des arbres.

Dans le domaine des sports de montagne, le changement climatique implique-t-il un renforcement ou une délocalisation des dangers ?
Il existe des régions plus exposées aux dangers naturels. Par exemple les régions à pergélisol raides qui se réchauffent ou les zones où la fonte des glaciers peut provoquer des effondrements de séracs et augmenter le risque d’inondation. En outre, certains événements se produisent parfois, comme l’éboulement de Bondo, entraînant la mort de randonneurs. De tels événements se produiront probablement plus souvent. 

Les hivers pauvres en neige sont plus fréquents. Que peuvent faire les amateurs de sports de neige pour sauver leur saison préférée ?
Ceux qui aiment la montagne et les sports d’hiver doivent prendre soin de la neige afin que les générations futures puissent aussi en profiter. D’un point de vue scientifique, il est indéniable que le changement climatique est fortement influencé par l’homme. Cela ne fait aucun doute. 

Et comment prendre soin de la neige ?
Quand on aime aller en montagne, il n’est pas nécessaire de se rendre chaque année dans les Andes, en Himalaya ou dans les Rocky Mountains. Découvrir les montagnes environnantes dans une logique de tourisme durable est tout aussi passionnant. Et les Alpes offrent d’innombrables possibilités. Mais il n’y a pas que la destination qui compte, il faut aussi être attentif lors du choix de l’équipement, par exemple en privilégiant celui qui a été produit en suivant des critères de durabilité. 

Tu penses donc que c’est un devoir pour les marques, mais aussi pour les détaillants comme Bächli Sports de Montagne ?
Oui, dans tous les cas.

Tu étudies le dérèglement climatique, tu essaies de le comprendre et de l’expliquer. Par notre comportement de consommateur, il est possible d’encourager les humains et les entreprises à plus tenir compte de la durabilité. N’y a-t-il pas une limite au-delà de laquelle on ne peut plus rien faire ?
Comme nous l’avons évoqué, l’activité humaine est largement responsable de l’évolution climatique. Nous actions ont donc une influence directe. Si l’on ne peut probablement plus arrêter le changement climatique, nous pouvons le ralentir. Ainsi, les générations futures seront moins lourdement impactées par ses effets négatifs. Et tant que des mesures peuvent être prises, il est faux de déclarer qu’à partir d’un moment X, il n’y a plus rien à faire, que c’est trop tard et que cela ne sert plus à rien. Repensons à ce qu’il s’est passé l’année passée et constatons à quelle vitesse l’humanité peut s’adapter lorsqu’elle est face à un danger. Il y a donc un réel espoir que nous puissions également faire preuve d’adaptation face au changement climatique.

Si l’on considère que l’humanité dispose d’une grande force d’adaptation, comment devrions nous agir face aux hivers qui, comme nous en avons parlé, ont tendance à disparaître ?
À l’avenir, il faudra certainement monter plus haut pour trouver de la neige. D’un autre côté, de nouvelles opportunités se révèleront peut-être l’été. Il faudra aussi que les amateurs de montagne fassent preuve de flexibilité. Par exemple, s’il n’y a pas encore de neige en octobre, il vaudrait mieux choisir des activités en montagne responsables et en accord avec les conditions plutôt que de recourir à la neige artificielle.



À propos de Peter Bebi
Peter Bebi travaille au WSL Institut pour l’étude de la neige et des avalanches SLF et dirige le groupe Écosystèmes montagnards. Ses recherches se consacrent essentiellement à la forêt de protection et à ses effets sur les dangers naturels. Il a grandi à Davos et, après des études et un doctorat à l’EPF de Zurich et un postdoc au Colorado (USA), il est revenu y vivre avec sa famille.

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